Le Grand Conseil saisi d’un projet de loi issu d’une proposition d’Ensemble à Gauche a décidé de faire un petit pas en direction d’une répartition intercommunale plus équitable de la prise en charge des sans-abris. Le Grand Conseil et par voie de délégation sa commission qui traite des affaires intercommunales, la CACRI a traité d’un projet de loi déposé par Ensemble à Gauche et dont le premier signataire Pierre Bayenet prévoyait la création d’une fondation intercommunale financée par toutes les communes afin de se partager les frais inhérents au sans-abrisme.

Il faut bien comprendre que l’effort effectué pour accueillir, héberger et loger les personnes sans-abri est historiquement à charge de la seule Ville de Genève qui offre ses infrastructures (locaux de la protection civile) et ses moyens financiers à hauteur d’environ 15 millions par an, avec, depuis une année environ, des contributions modestes de l’Etat et des autres communes. La commission a auditionné, bien sûr la Ville de Genève et la magistrate qui portait ce dossier, la conseillère administrative Christina Kitsos, accompagnée du conseiller administratif socialiste de Vernier Martin Staub.

Compte tenu d’un certain manque d’enthousiasme de ce dernier, elle a vite compris que le problème grippait du côté des communes. C’est la raison pour laquelle, la CACRI a décidé d’entendre l’Assocation des communes genevoises et en particulier son président, M. Xavier Magnin afin de bien comprendre la problématique de la prise en charge du sans-abrisme. La CACRI a très vite saisi que les communes se montraient très réticentes à ce qu’elles considèrent comme une ingérence du canton dans les affaires communales.

Le Conseil d’Etat, via M.Thierry Apothéloz chargé du dossier, a entre-temps a pris langue avec les communes et proposé un autre projet de loi le PL 16331, qui déchargeait l’Etat en posant le principe de la responsabilité des communes en la matière, mais sans les obliger à fournir des prestations aux sans-abris. En cours de négociation, les communes ont accepté de participer « spontanément » à hauteur d’un million de franc à la prise en charge des sans-abris, histoire de démontrer leur bonne volonté. Ce montant est toutefois assez ridicule en regard des quelques 15 millions de la Ville de Genève.

De nouvelles auditions ont eu lieu et les discussions sont allées bon train au sein de la CACRI qui a poussé le Conseil d’Etat à modifier son projet initial, pour prévoir le principe du financement solidaire, par toutes les communes genevoises, des coûts de prise en charge des sans-abris, et la possibilité pour le Conseil d’Etat d’imposer une clé de répartition. Hélas, ce projet qui était assez bon n’a pas passé la rampe de l’association des communes genevoises, qui y a vu une atteinte à l’autonomie communale, et qui a convaincu le Conseil d’Etat d’y renoncer, pour présenter une troisième mouture du projet, édulcorée.

Le député Pierre Bayenet, estimant à juste titre, que ce dernier projet n’énonçait pas assez clairement que la charge devait être répartie équitablement entre les communes est revenu avec quelques amendements mais le seul mot « solidaire » a réveillé l’antagonisme initial et conduit Pierre Bayenet à déposer un rapport de minorité. Au Grand Conseil, malgré un bon score d’estime, le rapport de minorité n’a pas passé la rampe. Le projet de loi édulcoré a quand même été voté à l’unanimité par le Grand Conseil qui a pris en compte l’aphorisme bien connu: « Un tiens vaut mieux que deux du l’auras. »  Il va à présent falloir surveiller si les communes tiendront leurs engagements financiers. Si elles ne le font pas, EAG relancera un projet de loi plus contraignant.

Christian Zaugg