Le Grand Conseil genevois a voté ce soir à une confortable majorité le projet de loi ainsi intitulé de notre député Pierre VANEK qui modifie la loi qui prescrit le serment que doivent prêter les conseillers-ères d’Etat à leur entrée en fonction (PL 12367).

Désormais, dès l’entrée en fonction du/de la remplaçant-e de Pierre MAUDET, suite à la prochaine élection complémentaire visant à le remplacer après sa démission inévitable, le ou les conseillers-ères d’Etat devront promettre ou jurer solennellement, devant le Grand Conseil assemblé…

« de ne solliciter, ni d’accepter, pour [eux-mêmes] ou pour autrui, ni directement, ni indirectement, aucun don, avantage ou promesse en raison de [leur] fonction et de [leur] situation officielle. »

Cette règle de ne pas recevoir des dons ou avantages existe explicitement pour le personnel de l’Etat (art.25 RPAC). Elle doit s’appliquer non seulement aux fonctionnaires placés sous les ordres du gouvernement, mais aussi – évidemment – aux conseillers-ères d’Etat eux-mêmes qui devraient être un exemple pour l’ensemble de la fonction publique en matière de probité dans l’exercice de leurs fonctions.

Cette interdiction de recevoir des dons privés est très importante dans le cas de magistrat-e-s appelés à trancher de questions ou à intervenir dans des dossiers où les enjeux matériels et financiers peuvent être considérables et où l’indépendance de ces décisions de toute attache ou lien d’intérêt personnel est capitale.

Pour EàG, ces règles ne doivent pas s’appliquer aux «petits » et être ignorées ou bafouées par les «grands» avec arrogance et superbe. Or, le cas affligeant de l’acceptation de très importants cadeaux occultes par le Conseiller d’Etat Pierre MAUDET doit être sanctionné par la Justice bien sûr, mais le Parlement doit aussi en tirer les conséquences.

Ainsi, outre la réprobation morale que doit soulever le cas, les député-e-s ont compris qu’ils devaient agir dans leur rôle de législateur, en évitant notamment que tout conseiller ou conseillère d’Etat puisse alléguer son ignorance en la matière à l’avenir. Le rapporteur PLR, ancien secrétaire général du Parti radical, a tenté de rallier une majorité hostile à cette réforme en affirmant qu’il ne fallait pas voter une loi en se basant sur un unique «fait divers».

Pierre Vanek lui a rappelé qu’on était – malheureusement – avec l’affaire Maudet non pas dans un «fait divers», mais dans une affaire aux facettes multiples, impliquant de nombreux dossiers et de nombreuses personnes faisant l’objet de poursuites du Ministère public, une affaire qui a ouvert une crise politique et morale sans guère de précédent à Genève.

L’allié PDC du PLR a envoyé au front une députée qui a cru bon de qualifier l’auteur de la proposition de «Torquemada»… Or la proposition s’inscrit dans le registre du respect de règles morales qu’il est étonnant de ne pas voir le PDC soutenir, même si elle est en effet sans doute inconfortable pour des gens comme Pierre Maudet ou Guillaume Barazzone. Pour l’UDC enfin… il était urgent d’attendre…

Quant au Conseil d’Etat, par la bouche d’Antonio Hodgers, il a dit qu’il pouvait «vivre avec», comme il pouvait «vivre sans», que de toute façon un tel serment n’avait, à teneur de l’avis du Directeur des affaires juridiques de la Chancellerie, «pas de portée légale» (sic !) et qu’il serait ainsi « purement déclaratif »…

Bref des éléments de relativisation massive de la portée de son propre serment qui sont un peu inquiétants dans la bouche du nouveau président du Conseil d’Etat. Un conseil personnel amical: il devrait prendre ces choses-là plus au sérieux, le dernier qui a considéré que d’avoir à défendre l’honneur de notre République était « une déclaration sans portée légale » est en passe de bien mal finir sa carrière politique…

Tous ces arguments dilatoires et aberrants n’ont pas été suivis. Nous nous félicitons du sursaut dans le bon sens d’une majorité du parlement ! Elle donne un signal de bon aloi pour des modifications plus contraignantes en la matière que nous avons d’ores et déjà proposées (PL BAYENET modifiant la LECO).