Le président du Conseil d’Etat François Longchamp dévoilait aujourd’hui son projet de loi sur la CPEG. « Au vu du contenu de ce projet, nul doute que l’intention n’est pas de sauver la Caisse, mais de la saigner », s’indigne Jean Batou, député EàG. « Derrière la pluie de chiffres et le jargon technique, ce projet prévoit d’amputer une nouvelle fois le montant des rentes et de supprimer tout objectif affiché, s’élevant aujourd’hui à 60% du dernier salaire assuré, d’augmenter les cotisations employés, de réduire massivement les cotisations employeur, de créer un système de retraites à trois vitesses et, à terme, de privatiser la Caisse. Le tout pour un coût de 4,8 milliards, payé intégralement par les assuré-e-s… ». Ensemble à Gauche (EàG) se battra contre cette attaque sans précédent contre la CPEG et soutiendra le projet de loi 12095, déposé à notre initiative par 43 député-e-s, qui permet à la Caisse de repartir d’un bon pied avec une recapitalisation beaucoup moins importante. Nous soutenons également l’initiative de l’ASLOCA et du Cartel intersyndical, qui assure la stabilité de la CPEG sur le long terme tout en garantissant la construction de logements bon marchés.

Longchamp dramatise afin de passer en force
Les difficultés actuelles de la Caisse sont dues à la baisse de son taux technique d’un demi-point, de 3% à 2,5%, décidée par son comité à la fin 2016. Cette baisse a fait plonger mécaniquement le taux de couverture de la Caisse. Pourtant, les excellents rendements 2016 (+5,7%) et 2017 (+5,9% sur les 8 premiers mois) ont amorti une bonne partie du choc, permettant au taux de couverture d’atteindre 59,6% à la fin août 2017, avec une perspective réaliste de dépassement de l’objectif de 60% fixé par la loi d’ici la fin de l’année. « Dans de telles conditions, il est clair que le catastrophisme ambiant a pour principal but d’imposer une dégradation brutale des retraites en évitant tout débat démocratique sérieux », s’insurge Jean Batou.

Un sacrifice inacceptable pour les assuré-e-s
Le projet Longchamp prévoit une amputation moyenne des retraites de la CPEG de 6,2%, rien que par la réduction de l’objectif de rente en pourcentage du dernier salaire assuré. « En ajoutant cela aux pertes d’au moins 12% consécutives à la fusion CIA-CEH (2014), et de 5% résultant de la hausse d’un an de l’âge pivot (2016), nous en sommes à près d’un quart de pertes pour les assuré-e-s », dénonce le député EàG. « C’est tout simplement inacceptable ! » Mais surtout, le projet de loi Longchamp contient une bombe à retardement contre le niveau futur des rentes. « Jusqu’ici, il a pu être maintenu à 60% du dernier salaire assuré après 40 ans d’assurance. Mais avec ce projet de loi, cet objectif serait abandonné pour une cible théorique de 56,3%, qui flotterait ensuite au gré des rendements de la Caisse. »

Plus de cotisations pour les employés, moins pour les employeurs
Le projet Longchamp prévoit une hausse du taux de cotisation moyen de 1 point pour les salarié-e-s (de 9% à 10%), tandis que le taux de cotisation « employeur » diminuerait de 4,1 points (de 18% à 13,9%). Au lieu de la répartition actuelle 1/3 – 2/3, il propose donc une répartition 42% – 58%. « C’est plus défavorable pour les salarié-e-s que celle de la moyenne des caisses de pension publique et privées au niveau national », dénonce Jean Batou. « De plus, le projet Longchamp implique aussi une régression de la solidarité entre assuré·e·s en péjorant le plan actuel de pénibilité aux dépens des salariés exerçant les métiers les plus durs et en instituant trois classes inégales d’assurés avec des taux de cotisations et des retraites différents. »

La primauté des cotisations : un poison pour les assuré-e-s
Avec le projet Longchamp, le niveau des retraites serait désormais calculé en primauté des cotisations. « La droite dure a toujours défendu la primauté des cotisations, parce qu’elle permet d’éviter le débat politique, soit la prise en compte des responsabilités de l’État dans le traitement des rentes de la fonction publique », dénonce le député. « En primauté de cotisations, aucun objectif de rentes ne serait plus ni affiché ni débattu, ce qui laisse la porte ouverte à des baisses massives des retraites. »

L’horizon Longchamp : la privatisation de la CPEG
Le projet Longchamp ne prévoit pas seulement une recapitalisation immédiate à hauteur de 80%. Il impose aussi une recapitalisation à 100% d’ici 2069. Ainsi, en 2051, le taux de couverture de la Caisse devrait atteindre 91% au lieu de 80% prévue par la loi fédérale, qui contraint depuis 2012 les caisses de pension publiques à un taux de capitalisation croissant, dont le chemin a été fixé dans la loi cantonale en 2014 (60% en 2020 ; 80% en 2052). « Pourquoi donc cette marche forcée vers une capitalisation intégrale ? », s’interroge Jean Batou. « Parce que le nouveau projet de loi cantonal se fixe comme objectif explicite, à son article 9, la privatisation totale de la CPEG, assortie de la suppression de toute garantie de l’État. »

Une autre voie est possible…
Des alternatives moins coûteuses et plus respectueuses des assuré-e-s existent pour la CPEG. Deux projets existent aujourd’hui, qui offrent une alternative. Le premier, un projet de loi impulsé par EàG et signé par 43 député-e-s, prévoit une recapitalisation beaucoup plus modeste (800 millions et une hausse de cotisations employé de 0,55% jusqu’en 2030) tout en permettant de respecter les obligations légales (maintien de l’objectif de rente de 60% du dernier salaire assuré et passage au-dessus du chemin de croissance prévu par la loi). Le second projet, soit l’initiative de l’Asloca et du Cartel intersyndical, offre une réponse à plus long terme. « Elle prévoit de recapitaliser la Caisse en investissant dans la pierre, plutôt que de jouer les retraites des fonctionnaires en bourse, permettant ainsi la construction de logements bon marché qui profitera à la population », se réjouit le député EàG.

Enfin, les résultats 2017 de la Caisse s’annoncent bien meilleurs que prévus, permettant sans doute déjà de dépasser le taux de couverture de 60%, exigé par la loi pour 2020. « Avec un tel résultat, la CPEG pourrait aborder l’avenir dans de meilleures conditions, voire envisager l’élévation de 2,5% à 2,6% de son taux technique, ce qui ferait encore monter son taux de couverture », conclut Jean Batou.