Un nième arrêté «COVID» (du 8 octobre) du Conseil d’État, a été traité en urgence par le parlement (RD 1434 et R980). Son approbation a été combattue au nom d’EAG par un rapport de minorité de Pierre Vanek. En effet cet arrêté est emblématique d’aspects absurdes de la politique menée en matière de lutte contre le COVID-19. D’un côté les autorités n’assument pas – comme politique publique – l’obligation de se faire vacciner et on entretient l’idée douteuse qu’il y aurait en la matière une «liberté de choix individuel» légitime. D’un autre côté, cette «liberté de choix» est contrainte et combattue en multipliant des brimades et des contrôles discutables visant à «pousser» les gens à se vacciner, comme les dispositions prévues dans cet arrêté. Malheureusement, tous les partis gouvernementaux ont suivi, sans réfléchir, les positions du Conseil d’État et ils ne s’est trouvé que la petite vingtaine d’élu.e.s d’EAG et de l’UDC pour dire NON à l’absurdité qu’il entérine.

Comme Pierre Vanek l’a déjà dit en plénière: les gens ont aujourd’hui le «droit» de ne pas se vacciner, mais cette prétendue liberté de choix est problématique. S’il y a une politique de santé publique qui passe par la vaccination de masse, ne faudrait-il pas l’assumer – y compris et jusqu’à l’obligation vaccinale – pour certaines catégories de la population, ce que permet la loi au plan fédéral ou cantonal aussi d’ailleurs ?

S’il n’y a pas une telle politique publique, décidée démocratiquement et assumée ouvertement par les autorités, des gens s’indignent – et on les comprend – quand on cherche à les pousser à se vacciner par des brimades administratives diverses, dont les dispositions de l’arrêté du 8 octobre sont très représentatives et méritent donc à ce titre d’être rejetées.

Un test volontairement non pris en compte
Qu’on en juge, l’arrêté introduit un nouvel art. 11 dans l’arrêté du Conseil d’État, du premier novembre 2020, d’application de l’ordonnance fédérale sur les mesures de lutte contre l’épidémie, qui contient deux alinéas. Le premier dit que:

Le dépistage ciblé et répétitif est mis en œuvre en application de la stratégie cantonale de dépistage fixée par le Service du médecin cantonal conformément à l’Ordonnance 3 sur les mesures destinées à lutter contre le coronavirus (COVID-19).

Ainsi, on impulse un «dépistage ciblé et répétitif» notamment sur les lieux de travail, dans des entreprises et des hautes écoles où l’on va tester les gens de manière régulière une fois par semaine. C’est fort bien et s’inscrit dans une stratégie cantonale de dépistage qui doit monter en puissance! Jusque-là on ne peut qu’applaudir. Mais l’art. 11 comporte un 2e alinéa – malvenu – qui dit ceci:

Un résultat négatif obtenu dans le cadre d’un dépistage ciblé et répétitif ne donne pas droit à la délivrance d’un certificat COVID-19 mais à une attestation, dont la validité est limitée au contexte dans lequel elle est émise.

Cela signifie qu’une partie significative de la population genevoise aura été testée, et qu’elle aura de ce fait et par ce biais obtenu un résultat négatif tout à fait officiel et médicalement reconnu, mais que ce résultat, arbitrairement et administrativement, ne sera pas pris en compte pour la délivrance d’un certificat COVID-19.

Ainsi l’information médicale pertinente existe, suite à un test régulièrement effectué. Mais le·la citoyen·ne qui se sera prêté au test, dans le cadre d’une stratégie cantonale de dépistage officielle à laquelle il·elle collabore, ne pourra pas faire valoir ladite info, faire valoir son propre résultat de test pour obtenir un certificat COVID.

Le·la citoyen·ne concerné sera contraint·e par l’alinéa 2 de l’art. 11 de l’arrêté d’effectuer un deuxième test, superfétatoire et médicalement inutile, mais privé et payant, pour obtenir le cas échéant un certificat Covid lui ouvrant les accès que l’on sait. La raison pour laquelle le Conseil d’État impose le gaspillage de ressources kafkaïen que constitue ce deuxième test, c’est pour forcer le·la citoyen·ne à payer un test privé inutile, comme brimade sensée le pousser à la vaccination !

Des citoyen·ne-s qui collaborent au dépistage vu comme des «profiteurs»
Or, le Conseil fédéral mène une politique (discutable par ailleurs) d’incitation à la vaccination à travers des tests payants… Mais il a pourtant compris que les tests répétitifs ciblés (et non payants car s’inscrivant dans une stratégie de dépistage) ne pouvaient décemment pas être ignorés pour la délivrance du certificat COVID. Cependant, notre Conseil d’État, plus royaliste que le roi, n’a pas voulu suivre le Conseil fédéral sur cette voie raisonnable. Il a donc maintenu l’obligation de tests payants (et matériellement tout à fait inutiles) pour maximiser la «pression» financière et administrative sur les gens afin de les pousser à «choisir» librement de se faire vacciner… plutôt que de leur dire en face : vous devez vous vacciner !

Confronté à ce problème sur lequel le député EAG en commission législative a mis le doigt, Monsieur Poggia y a réagi ainsi:

M. POGGIA […] Le but est d’empêcher les personnes de profiter du système pour obtenir ce qui ne serait pas obtenu autrement. C’est une discussion politique et non pas médicale. […] La collectivité ne doit pas payer les tests de conforts de certaines personnes. La collectivité a décidé que les personnes exerçant leurs libertés personnelles doivent assumer elles-mêmes les conséquences.

Pour lui, les gens qui bénéficient de tests gratuits dans le cadre d’une stratégie de dépistage seraient donc des «profiteurs du système» et l’égalité de traitement demanderait qu’on les embête en les contraignant de passer un deuxième test payant et inutile, comme «conséquence» de l’exercice « de leur liberté personnelle ».

EAG a proposé de condamner cette décision absurde, en demandant au Conseil d’État de supprimer l’alinéa 2 de l’art.11 que comporte son arrêté du 8 octobre dernier qui représente une brimade arbitraire et discutable envers une partie de nos concitoyen·ne·s.

Malheureusement, tous les partis gouvernementaux ont suivi, sans réfléchir, les positions du Conseil d’État et la disposition kafkaïenne de cet arrêté a passé la rampe…

Pierre Vanek