La majorité de droite (avec le MCG) a refusé l’entrée en matière sur le Budget 2022. C’est donc l’ensemble des nouveaux postes prévus qui passent à la trappe. Pourtant, le budget était loin de répondre aux besoins de la population. Ce vote reflète la volonté de la droite d’accélérer les politiques d’austérité, à n’importe quel prix et malgré la crise sociale.

Au contraire, le projet de budget 2022 démontrait une fois de plus l’aveuglement coupable du Conseil d’Etat à la crise sociale que nous traversons. Alors que le Canton de Genève était déjà le plus inégalitaire de Suisse, la crise a encore profondément accentué les inégalités sociales. D’autant plus que le gouvernement est resté extraordinairement passif devant ce phénomène. La part de personnes en fin de droits au chômage est passé de 19.9% en 2020 à 30.6 % en 2021 et 2022 ! Pourtant, aucune mesure conséquente n’est prévue pour lutter contre le chômage.

De l’autre côté, les plus riches continuent à s’enrichir. Les amendements apportés par le Conseil d’Etat en novembre concernant les prévisions de rentrées fiscales dévoilent des chiffres ahurissants : il est attendu que l’impôt sur la fortune croisse en 2021 de 7.5% ! Lorsque l’on sait que celui-ci augmente en moyenne deux fois moins vite que la fortune elle-même, on comprend que les grosses fortunes n’ont pas souffert de la crise et que l’« enfer fiscal » genevois est un mythe. Il au contraire urgent d’accroitre les revenus fiscaux de l’Etat, ce qui passe par une augmentation de l’imposition des dividendes, des grosses fortunes et des grandes entreprises, afin de répondre aux besoins de la population.

Car ceux-ci augmentent plus rapidement que la population, en particulier sous les effets de la paupérisation et du vieillissement. Ainsi, entre 2015 et 2019, alors que la croissance démographique était de 3.1%, le nombre d’hospitalisations aux HUG a augmenté de 7.9%. Le nombre de prises en charge ambulatoires a augmenté encore plus rapidement : 12.2%. Après deux ans de pandémie, la situation au sein des HUG est préoccupante.  La crise sanitaire a mis en lumière le manque de personnel et l’institution a tenu le choc essentiellement grâce à une mobilisation héroïque du personnel. Celui-ci est désormais lessivé, tant sur le plan mental que physique. De plus, il a été fortement exposé au virus et de nombreux-euses salarié-e-s sont en arrêt longue durée après avoir contracté des COVID longs. Sans un renforcement substantiel et rapide des équipes, il est probable que l’épuisement engendre encore davantage d’arrêts maladie, ce qui pourrait avoir des conséquences dramatiques sur le système des soins du canton. Les HUG ne s’en cachent pas, puisqu’on peut lire dans l’argumentaire du budget de l’institution que « l’état de fatigue et la perte de repères de nombreux collaborateurs épuisés par deux ans de pandémie est extrêmement préoccupant et les HUG devront tout mettre en œuvre pour limiter la vulnérabilité du système de soins». Pourtant, rien n’était prévu au budget pour renforcer les HUG ! C’est pourquoi Ensemble à Gauche a déposé en commission, un amendement exigeant une hausse de 10 millions de la subvention, afin de permettre d’engager du personnel supplémentaire.

Il faut néanmoins souligner que le projet de budget prévoit des renforcements bienvenus dans certains secteurs. C’est notamment le cas à l’Hospice général, qui doit faire face à une forte hausse du nombre de bénéficiaires à l’aide sociale, qui devrait de poursuivre en 2022 et les années suivantes. Actuellement, le nombre de dossiers par assistant-e social-e se situe à 84, ce qui est supérieur à la situation de fin décembre 2018, avant que le Grand Conseil décide d’augmenter les postes dans les cadres du budget 2019. Sans un renforcement, la charge de travail sera donc trop importante pour permettre un véritable travail de réinsertion. C’est également le cas au Service de protection de l’adulte (SPADe) où le sous-effectif est connu et où le nombre de mandats est en hausse constante. Actuellement, on compte 76 dossiers par curateur-trice, là où la Conférence en matière de protection des mineurs et des adultes en recommande 60 pour permettre un travail de qualité.

Il n’en fallait pas plus pour faire hurler la droite. Celle-ci égigeait en effet des « mesures d’économies structurelles », en clair : un plan d’austérité. La sainte alliance qui avait rassemblé les partis – du PS au PLR – lors du budget 2021 a donc volé en éclats. Pour cause, les milieux patronaux estiment que le gros de la crise est passé et que les aides – massives – aux entreprises sont assurées. L’union sacrée est donc devenue inutile et la droite s’attaque maintenant aux dépenses afin de défendre les intérêts des riches contribuables. Et tant pis si la crise sociale, elle, ne fait que commencer.

Le refus du budget révèle le durcissement de la droite, appuyée par le MCG, désireuse d’accélérer les politiques d’austérité. Face à une majorité antisociale au parlement, le rapport de force devra se construire à travers les mobilisations sociales.

Jean Burgermeister